La méthodologie qu’on vous distribue ou que vous lisez sur ce site est formidable, n’est-ce pas ? Longue, fournie, pleine de charmantes remarques… Mais elle est cependant assez (sinon beaucoup trop) abstraite, et dans les faits vous ne savez pas comment parvenir à un résultat satisfaisant. Mon but est ici de vous expliquer de quelle manière, durant mes années de licence, je m’y suis pris pour écrire une dissertation, étape par étape et de manière concrète. Bien sûr, ma technique est personnelle, et ne correspond pas à tous les profils ; je ne cherche donc qu’à apporter des idées supplémentaires dans la méthode de travail que l’on peut avoir, et si je partage cette expérience personnelle, c’est uniquement parce qu’elle a été concluante me concernant.
1) Inventorier tout ce que vous pouvez raconter dans votre dissertation
La toute première chose à faire, c’est (en utilisant les sources normales de vos connaissances, c'est-à-dire le cours et les plaquettes) de recueillir sur un brouillon tout ce que vous pourrez écrire dans votre dissertation sur le sujet. Ce sont des informations ; ce sont des critiques ; ce sont des raisonnements et des explications. Des éléments que vous pouvez donc lister (mais pas développer) sur un brouillon.
A titre d’exemple, pour une dissertation sur « la cohabitation sous la Vème République », vous pouvez lister :
· Ce que c’est que la cohabitation
· Les débuts de la cohabitation (pourquoi est-elle arrivée après 1958 et même après De Gaulle ? Pourquoi n’est-elle pas prévue par la Constitution ?)
· Les effets de la cohabitation sur le Président et sur le Premier ministre (effets positifs, négatifs)
· Les trois cohabitations (dates, éventuelles citations de personnalités politiques citées dans le cours ou les plaquettes)
· La fin de la cohabitation avec la réforme de Chirac sur le quinquennat (comment est-ce arrivé ? Pourquoi ? Quelles sont les conséquences ?)
Vous avez ainsi une base intéressante car derrière ces expressions que vous avez notées, il y a des paragraphes de cours ou des documents de vos plaquettes.
2) Créer les sous-parties
Maintenant que vous avez plein d’informations et d’éléments différents, vous allez pouvoir les classer et les trier de manière à obtenir quatre sous parties environ égales. Prenez les informations qui vont ensemble et qui traduisent une même idée ! N’oubliez pas qu’elles doivent être à peu près égales. Il existe de multiples manières de compartimenter tout le contenu que vous avez recueilli :
· Selon le sujet ou le sous-sujet (le régime, le domaine, le topo historique ou chronologique)
· Selon la critique et la réflexion que vous apportez (est-ce chouette ? pour qui ? pourquoi ?)
Ce sont les deux principales manières de distinguer vos sous-parties. Attention, les deux doivent exister au sein de votre dissertation ; des connaissances, et une réflexion sur ces connaissances (réflexions que vous pouvez tirer de vos cours, quand votre professeur dit que tel élément est problématique ou bénéfique pour une raison, ça sert). Mais vous pouvez fonder vos séparations sur l’un de ces deux critères.
Les possibilités sont multiples, et il y aura toujours une possibilité de faire un autre plan, ou simplement un plan semblable agencé légèrement différemment. Ça ne sert à rien de se casser la tête à trouver la répartition parfaite ici. Le plus important et que ça tienne la route ! L’exemple de la cohabitation peut notamment se décliner comme ceci :
· La cohabitation compromet le Premier ministre (tous les éléments qui montrent que le Premier ministre morfle un maximum quand il cohabite avec le Président)
· Les éléments relatifs à l’arrivée de la cohabitation sous la Vème République
· Les éléments relatifs à la fin de la cohabitation sous la Vème République
· La cohabitation renforce le Premier ministre (tous les éléments qui montrent que le Premier ministre reprend du poil de la bête face au Président
Vous remarquerez que comme par hasard (non en fait c’est fait exprès, incroyable) il est possible de regrouper ces quatre sous-parties par deux relativement facilement. Ce qui nous amène à la troisième étape (qui se fait d’ailleurs à peu près en même temps que celle-ci, enfin immédiatement après).
3) Organiser le plan
Une fois que vous avez quatre sous-parties, vous devez décider de manière définitive comment vous allez les agencer. Je dis définitive car quand vous les avez créées, vous aviez sûrement déjà un embryon de plan qui germait dans votre tête. Maintenant, il faut décider dans quel ordre les placer, et donc comment vous allez formuler votre réflexion dans votre dissertation. Notez bien que plusieurs solutions sont possibles ! Et parfois beaucoup. C’est à vous de décider comment vous comptez organiser votre exposé de connaissances doublé de votre critique de la situation. Voulez-vous mettre l’accent sur les côtés positifs de la chose ? Sur les côtés négatifs ? Selon votre réponse, vous allez commencer ou terminer votre dissertation par des sous-parties différentes. Bon, évidemment, il faut quand même faire attention à ne pas mettre la charrue avant les bœufs, et parfois certains sujets vous sembleront plus faciles que d’autres mais globalement, cette technique a toujours fait ses preuves pour moi. Bien évidemment rien ne vous empêchera le cas échéant de faire basculer un argument ou une information dans une sous-partie que vous jugerez trop légère une fois le plan fait.
4) Les titres, la problématique et le contenu de l’introduction
Maintenant, c’est le côté formel qui prend le dessus. Vous avez un plan tout mignon et plutôt équilibré, vous savez quoi mettre dans chacune de vos sous-parties, mais il reste un gros problème : les titres. Ils sont très importants (un passage à l’oral sur votre devoir vous en aura sans aucun doute convaincu) et doivent être travaillés. Eh bien c’est le moment ! Etant donné que vous venez de prévoir le contenu de chaque sous-partie, vous devriez être à même de leur trouver des titres pertinents ; vous aurez ainsi l’occasion de vous poser calmement et d’éviter de produire des titres ne répondant pas aux critères ultra-select de la faculté de droit qui discrimine entre autres les verbes conjugués, les conjonctions de coordination et tout ce qui n’est « pas qualifié ».
La problématique est également très importante ! Pas de grosse difficulté ici, il suffit de regarder le plan. Si ce dernier vous amène à dire « La cohabitation est née comme ceci BLABLABLA (IA) avant de disparaître pour ces raisons BLABLABLA (IB) ce qui est dommage car le Premier ministre pouvait faire des tas de trucs BLABLABLA (IIA) même s’il finissait par le payer politiquement BLABLABLA (IIB) » eh bien vous devez trouver la question qui provoquerait exactement cette réponse. Arrangez-vous donc pour que votre problématique touche à tous les éléments de réponse que vous offrirez. Par les adverbes, les compléments circonstanciels, les compléments du nom et les adjectifs, vous devriez pouvoir vous en sortir ; la méthodologie vous sera ici très utile pour vous rappeler à quoi ressemble plus concrètement une problématique.
Enfin, le contenu de l’introduction. Pour commencer, vous pouvez y balancer toutes les informations que vous n’avez pas casées dans le plan (très rare car en général dans une dissertation on a plutôt tendance à en manquer, surtout à l’examen) et puis de manière générale, une fois la méthodologie et le cours relus, vous n’aurez pas trop de mal à la remplir avec des citations, des remarques, l’intérêt du sujet (faites comme les enfants, demandez-vous pourquoi tout existe, ça aide) et si le sujet est précis, n’oubliez pas de parler d’éléments généraux gravitant autour du sujet, comme de la manière dont les pouvoirs fonctionnent sous la Vème République avec un Président, un Premier ministre (exécutif fort et bicéphale) voire de citer un article de la Constitution ou d’un Code. Bien sûr, tout ça il ne faut que le planifier vaguement, pas le rédiger. Car voilà la dernière étape.
5) La rédaction
Maintenant, il ne reste « plus » qu’à tout rédiger du début à la fin. L’introduction, puis les titres et les sous-parties (n’oubliez pas les chapeaux !) et le contenu de chaque sous-partie. Attention, il faut constamment garder à l’esprit le fil conducteur de votre argumentation car (on vous l’a sûrement dit et redit) la dissertation n’est pas qu’un gros paquet de connaissances sur le sujet mais bien une réflexion. Si vous vous emmêlez et perdez ça de vue, vous risquez d’être incohérent dans vos propos car vous le savez, plusieurs plans possibles existent dans une dissertation et on a vite fait de s’embarquer dans des explorations mentales excessives du sujet le jour de l’examen.
Fonctionnant à la main, j’avais l’avantage de ne pas avoir à revenir sur ce que j’écrivais ce qui me « forçait » à avancer et ainsi à garder un rythme. Mais l’ordinateur offre tout de même la possibilité de se corriger, ce qui reste un avantage en soi, bien que relatif. A vous de voir.
Et voilà ! Votre (splendide, magnifique, sublime) dissertation est écrite ! Dans une moindre mesure, cette méthode « inversée » fonctionne également pour le commentaire d’article et le commentaire d’arrêt, toutes proportions gardées. Je précise à nouveau que cette technique est celle que j’ai trouvée et utilisée de moi-même pendant mes années de licence, et que cela m’ayant réussi, je la partage pour éventuellement vous aider si vous rencontrez des difficultés. Gardez confiance en vous et surtout, suivez scrupuleusement les méthodologies que l’on vous donne en cours et les conseils de vos professeurs ! Après tout ce sont eux qui vous corrigent, en TD ou pour l’examen. Ce que j’écris n’a surtout pas pour but de remplacer tout ça, mais simplement d’en être un complément rassurant, et plus proche de vous.
Bon travail !
Fabien Callegari
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